Vendre son entreprise : il faut anticiper !
(Source : Les Échos Entrepreneurs du 3/5/2022 par Jean-Michel Huet et Sébastien Dunod)
La plupart des cessions d'entreprises sont réalisées sans préparation préalable digne de ce nom. Quelques menues retouches peuvent faciliter la cession. Pour vendre mieux (plus vite, plus cher…), il faut savoir anticiper.
Un délai de deux à trois ans est couramment recommandé pour préparer la mise en vente d'une entreprise. Ce délai permet d'anticiper la cession et d'intervenir à un niveau structurel de manière efficace.
La réalisation d'un diagnostic préalable à la vente contribue à définir les axes de travail optimisant les conditions de vente et les délais prévisibles. Ce diagnostic doit être réalisé par une personne extérieure à l'entreprise, capable d'interpréter la situation avec objectivité. [...]
Présenter un bilan propre
Un acquéreur demandera à voir les trois, voire les cinq, derniers bilans afin de s'assurer de la permanence d'un phénomène et de considérer qu'il est acquis (hausse du chiffre d'affaires, stabilisation de la rentabilité, etc.). Ainsi, un chiffre d'affaires en croissance la dernière année, après deux années de baisse, ne peut à lui seul attester du retour de la croissance. Ce peut être juste un « coup de chance » et l'on ne pourra emporter la conviction de l'acquéreur qu'avec un carnet de commandes qui vient conforter cet élément. [...]
Mieux vaut « nettoyer » le dernier bilan avant la mise en vente de son entreprise afin qu'il soit propre et en bon ordre. Même si la comptabilité a jusque-là été parfaitement tenue, quelques points peuvent néanmoins devoir être ajustés : s'assurer de la justesse des charges et produits constatés d'avance, limiter la taille des comptes courants d'associés et commencer, au besoin, à réduire le montant des réserves (les acquéreurs n'empruntent pas pour acheter de la trésorerie excédentaire), vérifier les clients douteux et les provisions, etc.
Tout le monde sait qu'il faut retraiter la rémunération du gérant et divers autres aspects. Pourtant, la plupart des acquéreurs préfèrent - consciemment ou non - voir un résultat en croissance plutôt que la rémunération du gérant en hausse et un résultat stagnant. De la même manière, certains « avantages en nature », pas forcément pris en compte par l'acquéreur, peuvent venir augmenter le résultat en réalisant des petits changements sur les derniers exercices de sorte à présenter une rentabilité optimale. Dans la même logique, il est facile de considérer que certains frais ne sont pas « nécessaires à l'activité » mais qu'ils correspondent à des dépenses liées au train de vie du cédant. Il est plus facile de convaincre un repreneur si, au cours du dernier exercice, ces frais n'apparaissent plus.
Limiter les dépendances de l'entreprise
L'essentiel est de limiter les dépendances de l'entreprise afin d'optimiser son attractivité dans le projet de cession. Il s'agit de dépendances de différents types :
· Dépendance au gérant. L'activité doit se maintenir sans difficulté en son absence. Elle doit même pouvoir ponctuellement se passer de lui/d'elle.
· Dépendance à un client. Si l'un d'eux représente 10 %, 15 % ou 20 % du chiffre d'affaires, l'éventualité de son départ - avec ou sans préavis - est un véritable frein pour l'acquéreur.
· Dépendance à un fournisseur. Si un fournisseur centralise une part significative de l'activité, même s'il offre des garanties de solidité et de stabilité de ses prix, il est essentiel de rassurer l'acquéreur grâce à un plan alternatif déjà activé.
· Dépendance à un homme clé. Si un salarié est une personne clé dans l'organisation, un acquéreur peut considérer cela comme une faiblesse, sauf à ce qu'il y ait déjà des alternatives en place. On ne peut en effet exclure que cette personne clé ne s'entende pas avec l'acquéreur et décide de quitter l'entreprise après sa cession.
· Dépendance technologique ou à un outil de production. Ici, la question pour l'acquéreur est de savoir si l'entreprise dispose des moyens pour assurer sa subsistance à moyen et à long terme. En effet, de lourds investissements nécessaires pour maintenir ou renouveler l'outil de production auront un impact négatif sur le prix de vente.
LES AUTEURS
>>Jean-Michel Huet est associé au sein du cabinet de conseil BearingPoint, il accompagne les gouvernements, opérateurs télécoms ou de l'énergie dans leur transformation stratégique et digitale. >>Sébastien Dunod entame sa carrière dans l'audit, externe puis interne, avant de créer sa première entreprise. Il est également coach de chefs d'entreprise et de startuppeurs. En 2017, il cède ses principales affaires dans l'informatique, les services à la personne et la formation afin de créer PME Partner, un cabinet spécialisé en cession-acquisition de TPE et PME. Les coauteurs : Alexandre Bernardi, Mélissa Etoke Eyaye, Denis Gallot, Olivier Guérin, Delphine Manceau, Adrien Perrot, Etienne Pouget, Nathalie Rodary, Jean-Edern Rougagnou.
Jean-Michel Huet et Sébastien Dunod